Bonjour à tous.tes,
Je vous propose de lancer une discussion sur la mise en place de pédagogies émancipatrices en cours de langues vivantes dans le 2nd degré : nous ne sommes pas bien nombreux.ses me semble-t-il, donc peut-être qu'une discussion ouverte est gérable. Toutefois, si besoin, nous pourrons au fur et à mesure proposer des sous-thèmes selon les envies et questionnements qui émergent.
Les récentes réflexions sur la liste et la variété des profils d'enseignants m'ont donné envie d'échanger de la façon la plus concrète possible avec vous !
Histoire de lancer la discussion, voici quelques pistes que je propose :
- travailler avec un plan de travail en langues : écueils, échecs et réussites.
- la place du fait de langue en classe : comment l'articuler à la méthode naturelle ?
- les épreuves du cycle terminal : compatibles avec la méthode naturelle ?
Louise
Méthode Naturelle en Langues Vivantes
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Re: Méthode Naturelle en Langues Vivantes
Très bonne initiative Louise. Je remets le lien vers le Padlet créé l'an dernier pour donner corps à tes pistes de réflexion
Méthode Naturelle en LV - ICEM 2nd degré (padlet.com)
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Re: Méthode Naturelle en Langues Vivantes
Bonjour à tous,
je souhaite revenir sur la question de la place de la grammaire en classe de langue vivante en Méthode Naturelle. J’ai essayé d’être clair et précis car c’est un problème qui suscite beaucoup d’intérêt. Certains d’entre nous ont consacré (ou s'apprêtent à consacrer) de l’énergie à sa résolution. Ma vision de la réponse est à la fois simple et complexe. Je m’explique.
Comme nous le savons, Freinet insiste sur l’idée que c’est en forgeant que l’on devient forgeron. Il faut nécessairement en déduire que c’est par l’activité langagière en langue vivante que l’on devient locuteur d’une langue étrangère. En d’autres termes, c’est en parlant une langue que l’on parvient à la parler, en l’écoutant et en la lisant que l’on parvient à la comprendre, en l’écrivant que l’on parvient à l’écrire. En langue vivante, le forgeron de l’adage est en somme quelqu’un qui pratique, qui vit cette langue avec sincérité et qui cherche à penser dans cette langue seconde. Cela implique que la théorie grammaticale n’est pas première. Il y a clairement en Méthode Naturelle une primauté de l’expression et de la réception sur la méta-réflexion.
Selon mes élèves, qui ont du bon sens et à qui j’ai soumis le sujet ce matin, la grammaire représente l’ensemble des règles qui permettent de se conformer à une norme langagière. Son présupposé est que le professeur connaît ces règles et que les élèves ne les connaissent pas. S’ils font des erreurs, ils seront très réticents à prendre la parole, précisément pour ne pas revivre l'émotion de s’être trompés. Ce que révèlent ces propos, que nous avons tous déjà entendu, c’est qu’il y a une logique des affects en jeu à prendre en compte. Ce n’est ainsi pas les erreurs, ni le manque de conformité à la norme qui porte ou pousse les élèves à progresser. C’est au contraire la joie éprouvée en parlant une langue étrangère qui constitue le moteur de leur apprentissage. C’est d’ailleurs ce que veut dire Freinet lorsqu’il parle de la vie. Cela veut dire qu’en tant que pédagogue, dont le mot signifie conduire, mener, l’enseignant fait de son mieux pour permettre à ses élèves d’accroître ce que Nietzsche appelle leur “puissance de vie” à travers l’expérience jubilatoire de la langue anglaise. L’enseignant s’attache donc à organiser la classe afin qu’ils puissent éprouver cet accroissement. Nous ne sommes ainsi pas dans une logique de procédures (dans laquelle à chaque erreur correspond une fiche ou un exercice) mais dans une logique de processus à travers lesquels l’élève se transforme. Il est à la fois le matériau et l’origine de cette transformation. Si on lit attentivement le message de Marion sur la réunion de coopérative, on y apprend que cela se produit lorsque l’élève fait quelque chose dont il ne se savait pas capable.
Quelle est alors précisément la place de la grammaire en PF ?
Je n’en fais pas. A la fois car la grammaire ne permet pas de lancer les élèves dans un travail authentique. (Il peut arriver qu’un ou deux élèves tiennent à travailler leur grammaire. C’est que ces élèves sont socialement déterminés par leur expérience d’écolier et qu’ils ont encore besoin de temps, de sécurité et du guidage de l’enseignant pour en sortir.) Mais aussi parce que la grammaire est, du moins au sens commun, une matière scolaire.
Personnellement, j’utilise la linguistique qui est une discipline scientifique plus vaste qui a l’avantage d’étudier les langues comme des systèmes sous leurs aspects phonologiques, syntaxiques, lexicaux et sémantiques. Lorsque je dis “j’utilise la linguistique”, je crois prudent de préciser que la proportion de cet usage équivaut à deux ou trois granules homéopathiques. L’art du pédagogue consiste à les “prescrire” au moment juste et à la ou les bonne(s) personne(s). Cela demande une expertise que, réjouissons-nous, chacun peut acquérir par un travail. Pour cela, il suffit de garder à l’esprit qu’en Méthode Naturelle nous visons à l’émancipation des élèves par le langage et la pensée authentique. L’enseignant est alors attentif à l’adéquation d’un éventuel apport linguistique (phonétique, syntaxique ou autre) avec un désir (singulier ou collectif) de s’exprimer ou de comprendre. En un mot, il se demande si le travail linguistique ne va pas se faire au détriment de ce désir et l’amoindrir.