La pédagogie Freinet, une question de vocabulaire ?
Posté : sam. 15 mai 2021 14:31
Bonjour à tous, je rapatrie donc ce questionnement qu'on eut plusieurs personnes sur nos listes, autour de l'utilisation d'un certains vocabulaire en pédagogie Freinet : conseil ou réunion de coopérative, responsabilités ou métiers, Entretien ou Quoi de neuf, avec une première suggestion de Nicolas Go :
mais aussi de Stéphane DaubillyUn bout de contribution :
- historiquement, les rapports entre pédagogie institutionnelle et pédagogie Freinet ont été assez (voire très) conflictuels. Je pense qu'il convient aujourd'hui de tourner cette page, et préférer la contradiction fraternelle.
- ce qui ne signifie ni les affrontements passionnels (que les nouvelles générations comprendraient mal et qui ne mènent nulle part), ni le consensus vague (qui dilue la radicalité des pratiques dans une "tolérance" confuse)
- il existe des différences réelles de conception et de pratique , et nous devons la clarté aux nouvelles générations ; il existe aussi du commun qui justifie le dialogue amical et les luttes partagées.
Un bout de réponse à Nicolas Monchand, pour compléter celle de Guy Goupil :
- ce qui différencie principalement les "institutions" (conseil, quoi de neuf, etc.), c'est le système pédagogique auquel elles appartiennent.
Par exemple, si tu fais de la pédagogie Freinet (dont la P.I. s'est largement inspirée, au point qu'elle est aujourd'hui chaleureusement accueillie au sein de l'ICEM), et que tu substitues le "conseil" à la réunion coopérative, ça n'a pas beaucoup de sens. A moins de vouloir passer progressivement de la P.F. à la P.I. Ou encore, si tu introduis les "ceintures" dans ton fonctionnement de classe, tu es déjà en P.I. Freinet ne l'aurait jamais accepté.
- A première vue, ça n'a l'air de rien. On a l'air de chipoter, et d'aucuns se diront qu'on peut "mélanger", que comme ça on "enrichit". En réalité, les conséquences sont importantes.
- les praticiens de la P.I., qui se sont inspirés de la P.F., sont parfaitement légitimes à défendre un tel mélange, puisque c'est ce qu'ils font par définition. Et c'est tout à fait respectable.
- les praticiens de la PF sont parfaitement légitimes à le refuser, non par "orthodoxie" (cette accusation est déloyale) mais parce qu'ils rejettent le mode de vie impliqué par la P.I.
Je propose, puisqu'il en est question ici, de distinguer la pédagogie institutionnelle de la pédagogie Freinet à proprement parler, et de rassembler les deux (avec d'autres variations, ou interprétations de la P.F.) dans le mouvement Freinet et au sein de l'ICEM. Il y a bien en ce sens une unité du mouvement Freinet international, qui s'est progressivement diversifié en composantes.
Ce phénomène de diversification, après la mort d'un fondateur, est une constante historique dans tous les domaines. Il nous appartient de veiller à ce qu'il ne donne pas lieu chez nous à 1. une logique de groupuscules ou de sectes (au sens propre de coupures) 2. une logique d'affadissement des audaces révolutionnaires au nom de la "tolérance".
Je crois qu'il est urgent de clarifier tout ça, et de définir ensemble ce que j'ai nommé des "lignes de partage", afin de distinguer 1. les composantes légitimes 2. les pratiques incompatibles, qui commencent à se développer au détriment de la Méthode naturelle de Freinet.
Pour conclure (désolé, c'est long, mais comment faire autrement pour éviter les confusions) :
Personnellement (ce qui ne compte pas beaucoup, car nous devons conduire une réflexion collective), je ne fais pas de P.I. et je n'en ferai jamais. Mais je suis ravi de discuter (loyalement) avec mes camarades de la P.I. (et des autres variantes de la P.F.) qui ont toute leur place au sein de l'ICEM contemporain.
Amicalement
Nicolas Go
P.S. : J'ajoute que le "débat philo" n'est pas une institution de la P.I. J'ai moi-même mis au point dans ma classe, au début des années 1990 en discussion passionnée avec Paul Le Bohec et pendant plusieurs années d'expérimentation, "la méthode naturelle de philosophie". C'est très modeste et très joyeux, comme toujours en Méthode naturelle...
Merci pour votre contribution. Je rajouterai également mes questionnements dans un prochain message.De même on trouvera sur cette page : les métiers (PI)/ responsabilités, les "messages clairs", les "arbres de connaissance", les marchés des connaissances, les débats philo ...
Cela témoigne de la pluralité de styles pédagogiques au sein du mouvement. Personnellement cela ne me choque pas car chacun doit pouvoir trouver à l'aide de chacune de ces techniques chaussure à son pied selon ce qu'il est capable de mettre en œuvre et cela en accord avec le milieu dans lequel il officie.
Une orthodoxie serait hors de propos à moins de ne s'adresser qu'à un certain type d'enseignant travaillant dans un milieu en accord avec cette orthodoxie. Un/une collègue travaillant en ULIS ou en ITEP ou dans une cité REP+ du 93 doit pouvoir trouver des ressources au sein du mouvement Freinet, comme un collègue travaillant à l'école de Vence !
"Le quoi de neuf" et "le conseil" n'ont pas les mêmes fonctions que "l'entretien du matin" et la "réunion de coopérative" c'est vrai ... Après je ne sais pas peut-être que l'accueil inconditionnel du sujet-enfant et la possible auto-gestion de la classe par le collectif d'enfants ça parlait à plus de gens à une époque.
Il a des années ou dans la classe on a besoin d'un "Quoi de neuf" et d'un "Conseil" et d'autres où les choses vont de soi alors ça ressemble plutôt à "l'entretien du matin" et "la réunion de coopérative".
Stéphane Daubilly